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Yoku’s Island Express les premières impressions – interview de Mattias Snygg

Displayweb a été invité par Just For Games, Sold Out et Team 17  à tester Yoku’s Island Express à Paris lors d’un événement. C’est Malik qui a joué l’envoyé spécial, retrouvez ses premières impressions sur Yoku’s Island Express et une interview de Mattias Snygg, Co-fondateur et Artiste chez Villa Gorilla.

Interview avec Mattias Snygg, co-créateur de Yoku’s Island Express lors de la séance hands-on du jeu, à Paris, le mardi 24 avril 2018, au Fantôme, un café bien équipé en bornes d’arcade et en flipper de la rue de Paradis.

Ben Dussy – « Yoku’s Island Express est un jeu pour enfants mais on y trouve des éléments un peu inquiétants, à l’image de certains films des studio Ghibli, pensez-vous que cette dimension un peu flippante représente quelque chose que les enfants apprécient plus que le côté lisse de beaucoup d’autres jeux ? »

Mattias Snygg – Personnellement, c’était des choses que j’aimais, moi, étant petit, et que je continue d’aimer. En théorie, je pourrais faire des jeux pour d’autres personnes que moi, mais si je veux les aimer moi-même, je dois être fidèle à mes goûts. Il y a dans Yoku un style visuel très coloré et joyeux, mais il faut qu’il y ait aussi les ombres qui vont avec. C’est un mélange.

Ben Dussy – Y a-t-il un message particulier dans Yoku’s Express Island, en rapport avec la nature ?

Mattias Snygg – Il n’y a pas de message moral à proprement parler, il s’agit plus d’un monde vivant, qui respire, et qui est habité par des créatures avec leurs conflits internes. Tout ça est traité avec humour, sur un ton très ludique mais il y a aussi des thèmes plus sombres, des références à des comportements humains plus ambiguës qui pointent leur nez ici et là.

Ben Dussy – La nature prend la place principale, mais y a-t-il des prédateurs qui nous veulent vraiment du mal ?

Mattias Snygg – Il y a des choses hostiles dans le jeu, mais vous en tant que joueur n’êtes pas en danger. On peut sauter du haut d’une falaise, se jeter contre tout, on ne risque rien. On ne peut pas vraiment mourir dans le jeu.

Ben Dussy – A quel point cela a-t-il été compliqué d’intégrer les mécanismes du flipper dans un environnement entièrement naturel ?

Mattias Snygg – Ça a été assez difficile. Si on retire tous les graphismes, et qu’on regarde juste les mécaniques de gameplay, c’était un travail faramineux de réussir à construire une structure qui fonctionne correctement, qui mélange ses différentes idées efficacement. Puis, il a fallu faire correspondre chaque élément à des représentations visuelles : les portes, les propulseurs, les souffleries… Seuls les bumpers eux-mêmes restent de véritables bumpers. Pour moi, pour qu’un design de jeu soit réussi, il faut que le gameplay en lui-même soit fonctionnel et amusant, mais il faut aussi qu’il s’intègre harmonieusement au monde dans lequel il a lieu. Et c’était ici un gros challenge.

Ben Dussy – Comment Team 17, les créateurs de la franchise Worms, se sont-ils retrouvés sur le projet ?

Mattias Snygg – C’était il y a environ un an, je développais le jeu avec mon collègue Jens Adersson, avec qui nous avons monté Villa Gorilla, et nous avions un produit qui… disons que nous avions abattu le gros du travail, les choses les plus difficiles étaient réglées et nous cherchions quelqu’un pour nous aider avec la QA (NDLR : Quality Assurance : détection et résolution des bugs, entre autres) et pour le marketing. Et ils nous ont bien aidé. Nous avions un produit qui correspondait bien à leur catalogue, et il n’a pas été question de modifier le jeu selon leurs standards.

Ben Dussy – Le personnage que l’on incarne dans Yoku’s Island Express est un scarabée qui pousse une boule… Dans la nature, on voit beaucoup ça mais la boule n’a pas tout à fait la même couleur…

Mattias Snygg – (Rire) Oui, en effet… Disons… Il y a des blagues de caca dans le jeu, si ça peut te rassurer…

Ben Dussy – C’est le cas, merci. Quand on regarde vos différentes illustrations hors Yoku, il y a une ambiance particulièrement sombre, des dystopies, des créatures mutantes, un univers pas spécialement très joyeux… Avez-vous des projets qui se rapprochent plus de ce ton-là après Yoku’s Island Express ?

Mattias Snygg – J’ai des tonnes d’idées dans ce domaine. Je ne sais pas ce que l’avenir me réserve. Je serai heureux de continuer à faire plus de choses dans l’univers de Yoku. Il y a beaucoup de choses que j’aimerais rajouter pour une éventuelle suite, on est en train d’en parler avec mes partenaires. Mais si on parle d’un projet idéal que j’aurais, j’adorerais faire un RPG, dans le style de Fallout 1 (1997) et Fallout 2 (1998), ce serait un rêve… carrément… J’aimerais aussi faire un remake de Moonstone (sorti su Amiga en 1991). Un remake gore bordélique, tu vois le genre… Mais c’est bizarre : quand tu bosses sur quelque chose de léger et joyeux, t’as toujours envie de faire du glauque et du bizarre. Et quand tu bosses sur quelque chose de sombre, c’était mon cas avant Yoku, tu ne peux pas t’empêcher de vouloir faire du lumineux, du réconfortant, et tout…

Ben Dussy – Oui, c’est classique, on finit peut-être par tes jeux du moment ?

Mattias Snygg – Alors, en ce moment, je suis sur Inside, que j’avais raté, très beau jeu, vraiment, j’adore la fin… Et je me suis lancé sur Fallout : New Vegas, que j’avais volontairement gardé de côté à l’époque de sa sortie, et je m’éclate…

Ben Dussy – Quelle faction as-tu choisi ?

Mattias Snygg – Je suis avec la New California Republic, mais… ça peut changer…

Impressions manette en main de Yoku’s Island Express


Il ne faut pas longtemps à Yoku, un scarabée bousier toujours accompagné de sa boule organique personnelle, pour devenir le facteur attitré de l’île où nous échouons en début de jeu. Très vite, les couleurs chatoyantes de ce jeu de flipper en monde ouvert enivrent les sens et la dense végétation qui recouvre l’intégralité de la carte forme un terrain d’expérimentation très varié pour exécuter les centaines de mini-défis disséminés autour de l’île de Mokumana. Construit sur un mode MetroïdVania où de nombreuses zones croisées auparavant ne deviennent accessibles qu’après avoir débloqué certaines aptitudes, le jeu se pare également d’une composante RPG. Les animaux rencontrés, amicaux ou hostiles vont se servir de nos talents pour régler leurs différents conflits, tout en s’assurant que notre progression bénéficie tout autant qu’eux des solutions qu’on leur apportera.

Le concept en lui-même est relativement audacieux, de mémoire, aucun jeu ne propose de nous promener dans un open world régi par les lois du flipper, mais c’est justement le monde ouvert lui-même, allié à une mécanique de jeu de rôle qui rend le tout si passionnant. Dans Yoku’s Island Express, votre personnage a un écran d’inventaire, dans lequel vous pouvez suivre les objets récoltés, une carte accessible à tout moment, qu’il vous faudra dévoiler en visitant les différents lieux, et certaines armes à votre disposition. Assez rapidement, Yoku gagnera une langue de belle-mère (vous savez, les sifflets de fête qui se déroulent en faisant un bruit très agréable) qui lui permettra de réveiller certains animaux endormis, puis un aspirateur à limaces explosives qui donnera la possibilité de briser certains blocs résistants. Plus tard, un grappin nous aidera à nous projeter dans les airs . Ces capacités une fois débloquées, on sera vite tenté de retourner vers les premières zones du jeu pour y nettoyer des passages auparavant obstrués. La carte permet d’ailleurs de zoomer sur chaque zone déjà visitée, ce qui autorise à voir précisément les mécanismes auxquels on a affaire, et ainsi de choisir si oui ou non, nos capacités actuelles justifient d’y retourner. Chaque mission qui nous est confiée fait également apparaître des points particuliers qui s’affichent sur notre carte et nous donnent des directions à prendre pour se lancer plus loin dans l’exploration, mais rien ne nous oblige à y aller tout de suite.

Yoku’s Island Express brille par plusieurs aspects, ses graphismes généreux, fortement inspirés des films du studio Ghibli , un gameplay « don’t die and retry » qui empêche toute frustration face à des passages un peu délicats et une construction qui mélange habilement les genres. Dès les premières minutes, on tombe sur une maison occupée par des boules de suie identiques à celle de Totoro, et de manière plus générale, le monde du jeu, perturbé par une malédiction qui a plongé la divinité bienveillante de l’île dans un profond sommeil qui fait apparaître ses cauchemars dans la réalité, est une ode à la nature, réconfortante et inquiétante à la fois. Mais le danger est maintenu à bonne distance, le pire qui puisse arriver si on rate son coup, c’est de perdre une petite quantité des fruits, la monnaie de l’île, que l’on récolte en grande quantité tout au long de l’aventure. De plus, de multiples checkpoints vous empêcheront de déprimer si vous ratez une marche et retombez six étages plus bas. Même pour quelqu’un qui ne maîtrise pas vraiment les subtilités physiques de la visée avec un bumper de flipper, le jeu offre un environnement qui favorise les essais multiples sans punir les moins doués.

Avec son atmosphère féerique, ses changements climatiques et ses décors variés, l’île est presque le personnage central du jeu. Qu’on se retrouve à faire de la spéléo dans les profondeurs de la terre, à glisser sur les pentes enneigées ou à rebondir gaiement dans la jungle, qu’il pleuve, qu’il vente, sur terre, en l’air ou même sous l’eau, le jeu ne cesse de se renouveler tout en accordant le foisonnement d’environnements à de nouvelles alternatives de gameplay.

En une heure de jeu, on découvre déjà tellement de fonctionnalités différentes qu’on se prend à se demander à quel homme-orchestre notre petit Yoku peut bien ressembler à la fin du jeu. Yoku’s Island Express prévoit pour vous une durée de vue de cinq ou six heures pour finir toutes les missions principales et huit heures si l’envie vous prend de nettoyer complètement la map.

Yoku’s Island Express sortira en digitale sur xBox One, PS4 et PC le 29 mai 2018. Une sortie en boîte qui inclura la Switch aura lieu dans le courant de l’été.