Maneater est un jeu d’action teinté de RPG en monde ouvert, développé par le studio Tripwire Interactive, dans lequel vous incarnez une femelle requin-bouledogue en quête de vengeance. S’il est un aspect que Maneater parvient à parfaitement réussir, c’est sans conteste de servir un fun copieux et décomplexé qui vous permettra de rapidement devenir une machine à engloutir.
Jeu : ManeaterGenre : Action / Requin / RPGStudio : Tripwire Interactive Editeur : Tripwire Interactive Date de sortie : 22 mai 2020 Plateformes : PC, PS4, Nintendo Switch, Xbox One Age : 18+ Prix conseillé : 59.99€
Kill Pete
Sommaire
Engloutir quoi, exactement ? Et bien, comme le narrateur omniprésent du jeu aime à le rappeler, le requin-bouledogue est considéré comme la poubelle des mers, ce qui signifie que vous serez amenés à ingurgiter absolument tout et n’importe quoi, des pauvres humains qui se baignent sur les côtes aux plus grands prédateurs aquatiques aux alentours, en passant par des plaques d’immatriculations ou panneaux indicateurs, le contenu douteux de containers abandonnés sous l’eau et bien sûr les chasseurs qui tenteront de freiner votre frénésie destructrice. Bien qu’il reste en fond de décor la plupart du temps, il y a un scénario dans Maneater. À la suite d’un court tutoriel dans lequel vous jouez votre mère, vous serez arrachée à ses entrailles par l’homme qui sera votre cible ultime, Scaly Pete (Pete l’écailleux, en français). Ce dernier, un fou furieux poursuivant lui-même une vengeance de longue haleine, et son fils, nettement moins versé dans le massacre d’animaux marins, seront votre objectif meurtrier principal. Mais il vous faudra d’abord grandir et accumuler de la force pour y parvenir.
Bébé Requin
Lorsque le jeu commence à proprement parler, vous ne serez qu’un bébé requin. Dangereux, certes, mais seulement pour les petites créatures du bayou qui accueillera vos premières heures de jeu. Il vous suffira de croiser la route d’un alligator pour comprendre que vous êtes encore loin du sommet de la chaîne alimentaire. C’est là qu’intervient la mécanique RPG du jeu. Au fur et à mesure que vous croquerez vos cibles, vous accumulerez de l’XP qui vous fera passer des niveaux. A certains stades, vous deviendrez adolescent, puis adulte, jusqu’à devenir un mégalodon aux attaques dévastatrices. Quand vous vous en prendrez aux humains, une jauge d’alerte se remplira peu à peu et des chasseurs débarqueront pour vous éliminer. Certains de ces chasseurs seront clairement identifiés et, si tant est que vous réussissez à les tuer, vous octroieront un niveau d’alerte supplémentaire et des améliorations possibles. Il vous faudra alors vous rendre dans la grotte la plus proche. Ces abris disséminés dans les différentes zones sont à la fois une zone de repos et de customisation de votre requin. En avalant différentes sortes de nutriments, vous pourrez améliorer vos capacités, qui se déclinent en 3 « classes ». La variété des possibilités est loin d’être immense mais vous pourrez équiper des effets de résistance, d’électricité ou de poison aux membres de votre squale et ainsi drastiquement modifié son apparence et son style de combat. Vous pourrez aussi vous ajouter quelques buffs de discrétion, de résistance ou de soin, et utiliser une capacité ultime (comme électrifier votre corps entier, diffuser une grosse quantité de poison ou vous recouvrir d’écailles de pierre). Cette capacité devra évidemment se recharger avec le temps.
Noyer le poisson
Cependant, il faut avouer qu’en dehors des événements liés à l’histoire principale et des quelques combats de boss, la plupart des activités proposées dans le monde de Maneater sont quelque peu répétitives et pas très inventives. Tuez 12 humains, mangez 20 mérous, tuez 20 humains, mangez 12 mérous… Les centaines de collectibles et les sous-missions paraissent vite identiques et une fois toutes les zones découvertes, la lassitude guette assez vite le joueur. Heureusement, l’humour foutraque du narrateur, journaliste local produisant une série de télé-réalité sur les chasseurs de requins, qui comble le silence légitime de notre personnage principal en commentant d’un ton sarcastique le moindre micro-événement vient apporter une vie certaine à ce massacre artificiellement prolongé. Les joueurs se débrouillant en anglais poufferont régulièrement en entendant les bêtises alignées avec entrain par ce sympathique personnage, mais faute de VF ou de sous-titres français, les non-anglophones passeront malheureusement à côté de ce plaisir. On notera particulièrement les dizaines de références cinématographiques qui parsèment les décors et les points de repères à découvrir, heureusement pour la plupart purement visuelles.
De Rouille et d’Os
D’un point de vue technique, Maneater est assez efficace. Malgré un système de combat qui interdit de rester « locké » sur une cible, rendant les combats relativement brouillons, le jeu trouve un équilibre bien dosé entre une palette simple d’attaques (mordre, frapper avec la queue, maintenir dans les mâchoires et projeter ses proies) et des situations de combat propices à utiliser ces techniques. La densité d’ennemis au mètre carré permet quant à elle de ne jamais se sentir complètement en sécurité tout en ménageant des pauses possibles à intervalles réguliers, notamment dans les grottes. Visuellement, l’atmosphère du jeu est joliment rendue, et de manière plus inattendue dans ses environnements sous-marins aussi, où la lumière de la surface pénètre avec douceur dans les eaux plus profondes. Et le son est extrêmement réussi, en particulier lors des affrontements contre les chasseurs, où les hurlements de douleur soudain engloutis sous les flots et le froissement de tôle des bateaux déchiquetés se disputent la place avec nos rugissements et le bruits très satisfaisant des os qui craquent sous nos dents. Cette furie sonore, alliée à la surpuissance de nos attaques et au placement judicieux d’une caméra complice, donne aux combats l’exacte sauvagerie qu’on est en droit d’attendre d’un jeu comme celui-ci.
Le requin a toujours été un formidable personnage de cinéma, mais son rôle au sein du jeu vidéo est trop rarement celui de sujet ludique. Maneater, même s’il pêche par un manque de renouvellement de ses activités, a réussi un sans faute au niveau du fun, un gameplay leste et rebondissant dont il est très dur de se détacher. Et quand vous dirigez votre machine de guerre de 12 mètres aux abords d’une plage où vous apercevez les mollets appétissants d’un baigneur isolé, il est impossible de ne pas laisser libre cours à notre nature de prédateur, surtout quand on sait que même une armée de chasseur ne pourra plus nous arrêter.