[TEST] Dorfromantik, un jardin sans fin

Je ne me suis pas méfiée une seule seconde. Construire des paysages en agençant des tuiles ? Où est la difficulté ? Où est le fun ? OK c’est joli, mais quoi d’autre ?

Ah ah.

J’ai lancé le jeu.

145 heures plus tard, j’y étais encore.

Jeu : Dorfromantik Genre : city-builder Studio : Toukana Interactive Editeur : Toukana Interactive Date de sortie : 28 avril 2022 Plateformes : Switch, PC Prix conseillé : 12,99€  solo Testé sur : PC Steam
Début de partie.

Oui, le concept est ultra-simple et n’offre, a priori, pas de difficulté particulière d’exécution : il suffit d’agencer des tuiles entre elles. Ces tuiles sont hexagonales et combinent (ou pas) plusieurs biomes : les champs, la prairie, la forêt, les villages, un chemin de fer et la rivière. Ces deux dernières tuiles sont un peu particulières puisqu’une tuile rivière ou une tuile chemin de fer doit nécessairement déboucher sur une tuile du même type (petite subtilité : les tuiles « gare aquatiques » combinent les deux) (et elles sont très jolies) (on est toujours content·es de tomber dessus).

Partant de ce principe, vous gagnez des points en ajustant bord à bord des tuiles compatibles, de même biome : 10 points par bord compatible. Si une tuile est compatible avec les 6 tuiles qui l’entourent, alors bingo, c’est un PERFECT et vous gagnez 1 (une) tuile supplémentaire. Oui, parce que le nombre de tuile n’est pas infini… Vous jouez et faites du point tant qu’il en reste. Votre objectif est donc de faire un score le plus gros possible, en construisant un monde le plus grand et le plus cohérent possible.

Fin de partie.

Une autre façon de faire du point et de gagner des tuiles, c’est de remplir de petites quêtes sur la carte : construire un village de 15 maisons, une rivière longue de 37 tuiles, une forêt contenant 1276 arbres. Quand vous en réalisez une, d’autres quêtes apparaissent, et cette forêt, dans l’idée, elle peut être sans fin…

DE LA DROGUE PURE

C’est comme ça que Dorfromantik vous attrape et ne vous lâche plus : en vous rendant heureu·se. À chaque tuile correctement posée (et ça n’est pas très compliqué), petit shot de dopamine. Vous regardez votre paysage s’étendre doucement, avec une satisfaction de plus en plus grande. Vous atteignez les différents paliers d’objectifs assez rapidement, vous gagnez des items à chaque fois (à savoir de nouveaux éléments de décor : moulins, animaux dans les forêts, couleurs des arbres…) et votre monde s’enrichit toujours plus. Mine de rien, ça fait déjà deux heures que vous y êtes.

Après ma découverte du jeu, il n’y avait pas de journée sans partie de Dorfromantik. Il ne demande pas beaucoup d’effort, juste un peu de concentration, d’observation : c’est de la pure discrimination visuelle. Vous cernez rapidement les quelques stratégies qui paient (fermer ou ne pas fermer tel biome, permettre à une rivière de s’étendre, éviter de confiner ses villages entre les voies ferrées, optimiser les tuiles entièrement constituées d’eau etc.) : vous scorez de plus en plus fort et c’est BON. Vos cartes deviennent gigantesques et vous commencez à ressentir le plaisir qu’a dû éprouver Dieu au 7e jour avant de taper sa meilleure sieste, le plaisir du travail bien fait.

Pourtant, infailliblement, ça finit par coincer. Au fil du temps les quêtes deviennent de plus en plus gourmandes, il devient difficile de gagner de nouvelles tuiles. Vous voyez le stock diminuer, diminuer et puis à un moment, il n’y en a plus. Le jeu s’arrête. Votre score est énorme mais vous vous sentez mal et la seule façon de vous sentir à nouveau mieux, c’est de relancer une partie.

Voilà où vous mènera Dorfromantik : à l’addiction. La première fois que vous enchainerez les parties pendant 6h de suite, vous allez en sortir tout bizarre. Possible que la nuit qui suivra, dans vos rêves, vous fassiez tourner des tuiles pour rechercher leur emplacement optimal.

Et vous y arriverez d’autant plus vite que rien, rien n’éveillera en vous la moindre sensation de danger : la musique ne vous lassera jamais, toute douce et caressante, la DA est colorée et dessinée à la main dans des palettes natures d’un monde qui n’a pas encore cédé au capitalisme, vous construisez de petites utopies éternelles et paisibles, sans prédateurs, sans violence, sans extraction de ressources, sans routes et sans bagnoles ; et souvent vous vous direz, en zoomant sur un coin de votre carte : « Je voudrais vivre ici. »

Je voudrais vivre ici.

FAITES ENTRER L’ACCUSÉ

Le responsable de cette machiavélique torpeur extatique, c’est Toukana Interactive, le studio de quatre étudiants berlinois, Luca Langenberg, Sandro Heuberger, Zwi Zausch, et Timo Falcke. Je vous conseille la page Itch.io des quatre gus, vous y trouverez le prototype de Dorfromantik imaginé lors de la game jam de Ludum Dare en 2020, mais également la version 0.6 d’un jeu que je n’ai pas testé mais qui ne peut pas être mauvais, vu que c’est un city builder « avec des souris et de la solidarité », The Mice Guy. Merci de m’en donner des nouvelles si vous vous lancez dessus !

Dorfromantik : le prototype !

IL VOUS FAUT PLUS D’INFOS ?

Dorfromantik contient plusieurs modes de jeu : le mode classique, celui qui évaporera vos nuits et vos jours de congé, un mode rapide avec un nombre de tuiles limité, un mode mensuel qui propose de vous mesurer chaque mois au reste du monde avec un défi différent (seulement un type de tuile ou sur une aire de jeu délimitée…), ainsi qu’un mode créatif où vous aurez le loisir de créer le paysage de vos rêves, villes cernées d’eau, forêts sans fin ou petits villages agricoles. Le jeu offre enfin un mode difficile, avec une courbe de difficulté diabolique et des possibilités de quêtes plus restreintes.

Mode mensuel de novembre 2022, dans une aire limitée.

Cela vous permettra de faire varier les plaisirs car vous l’aurez compris, vos cités, vos forêts et vos champs n’évolueront pas. Une tuile posée est posée définitivement et rien ne peut la modifier. Il y a bien des variations dans les biomes (gelés, printaniers, arides…), mais cela n’évolue pas dans le temps, mais bien dans l’espace, en fonction de l’endroit où vous les posez.

CONCLUSION

Dorfromantik est sorti en accès anticipé en mars 2021, avant son lancement officiel le 28 avril 2022. La version Nintendo Switch est sortie le 29 septembre de la même année. « Wholesome game » par excellence, son aspect city-building coloré et non-violent lui a valu une franche réussite auprès des amateurices du genre. La simplicité de son gameplay a d’ailleurs permis la création d’un jeu de plateau chez Pegasus Game par Michael Palm et Lukas Zach, qui devrait sortir en février 2023.

Direction artistique
9
Gameplay
9
Durée de vie
8
Musique et sound design
8.5
Alors ton avis ?2 Notes
4.4
C'est beau.
C'est doux.
C'est gentil.
C'est simple.
C'est addictif.
Mais heureusement, vous finirez par vous lasser (comptez quelques mois).
8.6